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Décret n° 2004-1024 du 28 septembre 2004 relatif à l'importation à des fins de recherche de cellules souches embryonnaires, aux protocoles d'études et de recherche et à la conservation de ces cellules et portant application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique

Education nationale, enseignement supérieur et recherche - NOR : MENR0401951D - JO du 30-09-2004, pp. 16802-16804

Vu code de la santé publique, not. art. L. 1243-2 et L. 1243-5 ; code des douanes, not. art. 38 ; L. n° 2004-800 du 06-08-2004, not. art. 37 ; D. n° 90-437 du 28-05-1990 mod.

TITRE Ier

DISPOSITIONS GÉNÉRALES RELATIVES À L'IMPORTATION À DES FINS DE RECHERCHE DE CELLULES SOUCHES EMBRYONNAIRES, AUX PROTOCOLES D'ÉTUDES ET DE RECHERCHE ET À LA CONSERVATION DE CES CELLULES

Art. 1er. - Les dispositions du présent décret s'appliquent à l'importation à des fins de recherche de cellules souches embryonnaires, aux protocoles d'étude et de recherche portant sur ces cellules souches embryonnaires importées ainsi qu'à la conservation de ces cellules souches embryonnaires importées.

Art. 2. - Tout établissement ou organisme qui importe à des fins de recherche des cellules souches embryonnaires ou celui qui procède à des études ou des recherches sur des cellules importées s'assure que celles-ci ont été prélevées sur des embryons conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation et ne faisant plus l'objet d'un projet parental.

Il vérifie également que le couple dont les embryons sont issus ou le membre survivant de ce couple a consenti préalablement à ce que les embryons fassent l'objet de recherches. Il doit pouvoir justifier qu'il s'en est assuré.

Art. 3. - Tout établissement ou organisme qui détient des cellules souches embryonnaires ne doit divulguer aucune information qui permettrait d'identifier le couple ou le membre survivant du couple qui a fait don de ces cellules.

Art. 4. - Seuls peuvent obtenir l'autorisation d'importer à des fins de recherche des cellules souches embryonnaires ou l'autorisation de procéder à des études ou des recherches sur ces cellules les établissements ou organismes titulaires de l'autorisation de conservation des cellules souches embryonnaires à des fins scientifiques ou ceux ayant conclu une convention avec un établissement ou organisme lui-même titulaire de cette autorisation.

Ces autorisations peuvent être demandées simultanément par un même établissement ou organisme. Dans ce cas, l'autorisation d'importation ou l'autorisation du protocole d'étude ou de recherche ne prend effet qu'à compter de la date à laquelle l'établissement ou l'organisme est autorisé à conserver les cellules souches embryonnaires.

TITRE II

PROCÉDURES D'AUTORISATION

Art. 5. - La demande d'autorisation accompagnée d'un dossier est adressée en vingt exemplaires au ministre chargé de la recherche ainsi qu'en deux exemplaires au ministre chargé de la santé sous pli recommandé avec demande d'avis de réception ou est déposée contre récépissé auprès de ces deux ministères dans les mêmes conditions.

Cette demande ne peut être examinée que si elle est accompagnée d'un dossier justificatif dont le modèle est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la recherche et de la santé.

Ce dossier doit comprendre, dans tous les cas, tout document attestant le respect des conditions fixées à l'article 2 du présent décret.

Selon la nature de la demande, il comporte notamment les éléments d'information mentionnés aux 1°, 2° et 3° ci-dessous :

1° Pour l'autorisation d'importation à des fins de recherche :

– la copie de l'autorisation de conservation obtenue par le demandeur ou de la convention conclue avec l'établissement ou l'organisme titulaire de cette autorisation ou, à défaut, du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation par le demandeur lui-même ou par l'établissement ou organisme avec lequel il a conclu la convention ;

– la désignation précise des cellules souches embryonnaires concernées ;

– le nom, le statut et les coordonnées de l'organisme étranger fournisseur ;

– les procédés de prélèvement et de conservation des cellules utilisés par l'organisme fournisseur ;

– la description des moyens mis en place pour assurer la traçabilité des cellules ainsi que de leurs modalités de conservation et de transport ;

– les résultats des analyses concernant les marqueurs bio- logiques d'infection.

2° Pour l'autorisation d'un protocole d'étude ou de recherche :

– la description de l'étude ou de la recherche envisagée comportant en particulier les éléments justifiant qu'elle est susceptible de permettre des progrès thérapeutiques majeurs et qu'elle ne peut être poursuivie par une méthode alternative d'efficacité comparable en l'état des connaissances scientifiques ;

– la copie de l'autorisation d'importation des cellules souches embryonnaires obtenue par le demandeur ou du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation ou, à défaut, copie de l'autorisation d'importation de l'établissement ou organisme avec lequel le demandeur a conclu une convention ou du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation par cet établissement ou organisme ;

– la copie de l'autorisation de conservation obtenue par le demandeur ou de la convention conclue avec l'établissement ou l'organisme titulaire de cette autorisation, ou, à défaut, du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation par le demandeur lui-même ou par l'établissement ou organisme avec lequel il a conclu la convention ;

– la liste et la qualification des membres de l'équipe de recherche ainsi que le nom de la personne responsable de l'étude ou de la recherche.

3° Pour l'autorisation de conservation à des fins scientifiques :

– la copie de l'autorisation d'importation des cellules souches embryonnaires obtenue par le demandeur ou du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation ou, à défaut, copie de l'autorisation d'importation de l'établissement ou organisme avec lequel le demandeur a conclu une convention ou du document attestant le dépôt de cette demande d'autorisation par cet établissement ou organisme ;

– le plan des locaux, et leur organisation, en précisant, le cas échéant, la répartition des diverses activités ;

– la liste et la qualification du personnel chargé de l'activité de conservation et la nature des missions qui lui sont confiées ;

– une description précise des équipements et matériels, y compris ceux relatifs aux transports des cellules, ainsi que des procédés de conservation utilisés ;

– le cas échéant, l'indication de l'existence sur le même site d'activités autorisées en application des articles L. 1243-2 et L. 1243-5 du code de la santé publique.

Le dossier est réputé complet si, dans un délai de huit jours à compter de sa réception, le ministre chargé de la recherche n'a pas fait connaître au demandeur les informations manquantes ou incomplètes par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en indiquant le délai imparti pour les fournir. Le délai de réponse du demandeur n'est pas compté dans le délai de huit jours mentionné ci-dessus.

Art. 6. - Le ministre chargé de la recherche transmet pour avis le dossier réputé complet au président du comité ad hoc.

Le comité rend son avis au ministre chargé de la recherche et au ministre chargé de la santé dans un délai de trente jours à compter de la date de réception par le président du comité du dossier transmis par le ministre chargé de la recherche.

L'absence d'avis dans le délai de trente jours vaut avis défavorable.

Art. 7. - Pour toutes les autorisations, il revient au comité ad hoc de vérifier le respect des principes éthiques.

Pour les autorisations d'étude et de recherche, l'avis rendu par le comité ad hoc comporte une appréciation sur la pertinence scientifique du protocole et son intérêt pour la santé publique. Il prend notamment en considération les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques des personnels.

En outre, pour les autorisations d'étude et de recherche et pour les autorisations de conservation, l'avis du comité ad hoc tient compte des locaux, des matériels, des équipements ainsi que des procédés et techniques mis en oeuvre par le demandeur. A ce titre, il vérifie l'existence de dispositifs d'alarme et de sécurité et de moyens garantissant la qualité et la traçabilité des cellules.

Lorsque les établissements et organismes demandeurs d'une autorisation de conservation exercent simultanément sur le même site des activités visées aux articles L. 1243-2 et L. 1243-5 du code de la santé publique, le comité s'assure qu'ils ont prévu des procédures garantissant le respect des règles d'hygiène et des circuits séparés afin d'éviter tout risque de contamination.

Art. 8. - La décision conjointe des ministres chargés de la recherche et de la santé intervient dans le délai de deux mois suivant la date de réception du dossier complet.

Les ministres chargés de la recherche et de la santé ainsi que le président du comité ad hoc peuvent demander, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, toute information complémentaire qu'ils estiment nécessaire. Ces informations peuvent inclure des données financières et comptables relatives à l'établissement ou organisme demandeur.

En cas de demande d'information complémentaire, les délais mentionnés respectivement à l'article 6 et au premier alinéa du présent article sont suspendus jusqu'à ce que les informations complémentaires requises aient été fournies.

L'absence de décision dans le délai mentionné au présent article vaut décision implicite de rejet.

Art. 9. - La personne responsable de l'étude ou de la recherche adresse aux ministres chargés de la recherche et de la santé un rapport d'activité annuel sur l'étude ou la recherche entreprise. Elle leur fait parvenir le rapport final de l'étude ou de la recherche dès l'achèvement de celle-ci. Ce rapport contient, en particulier, les informations relatives à la destination des cellules souches embryonnaires ayant fait l'objet du protocole, notamment à leur destruction.

Sur demande des ministres chargés de la recherche ou de la santé, la personne responsable de l'étude ou de la recherche rend compte de l'état d'avancement des travaux.

Art. 10. - Les autorisations portant sur les protocoles d'étude et de recherche et les autorisations de conservation sont délivrées pour une durée maximale de cinq ans. Les autorisations d'importation sont demandées pour chaque opération envisagée.

Les autorisations mentionnent le type d'activité concernée, à savoir l'importation, l'étude ou la recherche, ou la conservation.

Art. 11. - Toute modification des éléments figurant dans le dossier de demande d'autorisation est portée à la connaissance des ministres chargés de la recherche et de la santé. Ces derniers peuvent demander toute information complémentaire afin de s'assurer que la modification en cause n'affecte pas le respect des dispositions législatives et réglementaires relatives aux conditions de délivrance des autorisations ni de celles fixées par l'autorisation.

Si les modifications signalées affectent le respect des dispositions législatives et réglementaires mentionnées au premier alinéa du présent article ou l'objectif de l'étude ou de la recherche, une nouvelle demande d'autorisation est nécessaire pour la poursuite de l'activité.

S'agissant de l'autorisation de conservation, le titulaire de l'autorisation informe, en particulier, les ministres chargés de la recherche et de la santé préalablement à toute cession ou à toute nouvelle détention de cellules souches embryonnaires. En cas de cession, il doit justifier que les cellules sont cédées à un établissement ou organisme titulaire d'une autorisation de protocole d'étude ou de recherche sur ces cellules ou d'une autorisation de conservation. En cas de détention de cellules souches embryonnaires non désignées dans la demande d'autorisation initiale, le titulaire de l'autorisation de conservation doit produire une copie de son autorisation d'importation ou de celle de l'établissement ou organisme avec lequel il a conclu une convention.

Art. 12. - Le ministre chargé de la recherche tient à jour la liste des établissements et organismes autorisés et la communique au ministre chargé de la santé. Il transmet la liste des établissements ou organismes autorisés à importer des cellules souches embryonnaires au ministre chargé des douanes.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé est informée par le ministre chargé de la recherche des activités de conservation de cellules souches embryonnaires réalisées sur le même site que des activités autorisées par elle en application des articles L. 1243-2 et L. 1243-5 du code de la santé publique.

Art. 13. - Les établissements et organismes autorisés au titre du présent décret tiennent un registre des cellules souches embryonnaires qu'ils détiennent.

Le registre mentionne :

– la provenance des cellules souches ;

– les résultats des analyses concernant les marqueurs biologiques d'infection ;

– le nombre de lignées cellulaires détenues ;

– le lieu de conservation ;

– la destination des cellules souches embryonnaires : recherche, cession ou destruction.

Art. 14. - En cas de violation des dispositions législatives ou réglementaires ou de celles fixées par l'autorisation, les autorisations portant sur les protocoles d'étude ou de recherche et les autorisations de conservation peuvent être suspendues ou retirées à tout moment par décision conjointe du ministre chargé de la recherche et du ministre chargé de la santé, après avis du comité ad hoc.

Avant toute décision de suspension ou de retrait d'autorisation, le titulaire de l'autorisation est mis en demeure, par le ministre chargé de la recherche, de mettre fin à ses manquements dans le délai qui lui est fixé ou de présenter ses observations.

Si les observations formulées par le titulaire ou si les mesures qu'il a prises ne sont pas de nature à mettre un terme aux manquements constatés, le ministre chargé de la recherche et le ministre chargé de la santé notifient au titulaire leur décision de suspension ou de retrait de l'autorisation, après avis du comité ad hoc.

La décision de suspension mentionne le délai imparti au titulaire de l'autorisation pour mettre fin aux manquements constatés.

TITRE III

LE COMITÉ AD HOC

Art. 15. - Les membres du comité ad hoc sont nommés par arrêté conjoint des ministres chargés de la recherche et de la santé.

Le comité désigne en son sein un vice-président appelé à suppléer le président.

Art. 16. - Le mandat des membres du comité ad hoc s'achève à la date de publication du décret portant nomination du directeur général de l'Agence de la biomédecine et du décret prévu à l'article L. 2151-8 du code de la santé publique.

En cas de décès, démission ou cessation de fonctions pour toute autre cause d'un membre du comité en cours de mandat, son remplacement s'effectue dans les mêmes conditions que sa nomination.

Art. 17. - Le comité ne peut délibérer valablement qu'en présence de dix membres dont au moins trois appartiennent à la catégorie mentionnée au c du II de l'article 37 de la loi du 6 août 2004 susvisée. Si le quorum n'est pas atteint, le comité est à nouveau convoqué dans les quinze jours avec le même ordre du jour. Il délibère alors valablement quel que soit le nombre de membres présents.

Les avis sont rendus à la majorité simple des membres présents sur le rapport d'un des membres du comité désigné par le président.

En cas de vote avec partage égal des voix, la voix du président est prépondérante.

Le comité peut entendre toute personne dont elle estime l'audition utile à son information.

Les séances du comité ne sont pas publiques.

Art. 18. - Le comité communique ses avis au ministre chargé de la recherche et au ministre chargé de la santé. L'avis du comité mentionne notamment le nom des personnes ayant délibéré sur la demande.

Art. 19. - Un membre du comité qui aurait un intérêt personnel direct ou indirect dans une affaire soumise au comité doit en faire la déclaration au ministre chargé de la recherche et au ministre chargé de la santé. Le ministre chargé de la recherche en informe le président. Il ne peut être désigné comme rapporteur et ne peut participer ni au débat ni au vote sur cette affaire.

Les membres du comité ainsi que les personnes ayant à connaître des informations qu'il détient sont tenus au secret professionnel. Ils doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous faits, informations ou documents dont ils ont connaissance à l'occasion de leur participation aux travaux du comité.

En cas de manquement aux dispositions du présent article de la part d'un membre du comité ad hoc, les ministres chargés de la recherche et de la santé peuvent mettre fin à ses fonctions de membre du comité après l'avoir préalablement mis à même de présenter ses observations.

Art. 20. - Le secrétariat du comité est assuré par les services du ministre chargé de la recherche conjointement avec les services du ministre chargé de la santé. Un représentant de l'Etablissement français des greffes assiste, en tant que de besoin, ce secrétariat.

Les dossiers, délibérations et avis sont conservés par le secrétariat du comité.

Art. 21. - Les fonctions de membre du comité ad hoc sont exercées à titre gratuit. Les frais de déplacement et de séjour des membres de ce comité peuvent être pris en charge dans les conditions fixées par la réglementation applicable aux fonctionnaires de l'Etat.

Art. 22. - Le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, le ministre de la santé et de la protection sociale, le ministre délégué à la recherche et le secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 28 septembre 2004.

Jean-Pierre RAFFARIN

Par le Premier ministre :

Le ministre de l'éducation nationale,
de l'enseignement supérieur et de la recherche,

François FILLON

Le ministre d'Etat, ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie,

Nicolas SARKOZY

Le ministre de la santé
et de la protection sociale,

Philippe DOUSTE-BLAZY

Le ministre délégué à la recherche,

François D’AUBERT

Le secrétaire d'Etat au budget
et à la réforme budgétaire,

Dominique BUSSEREAU