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Décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 relatif à la constatation et à l’apurement des débets des comptables publics et assimilés

Budget, comptes publics et fonction publique - NOR : BCFR0756699D - JO du 07-03-2008, texte n° 45

Vu Constitution, not. art. 74 et 77 ; code des juridictions financières, not. art. R. 112-18 ; code de l’éducation ; art. 60 de la L. n° 63-156 du 23-02-1963 mod., not. I, V à IX, XII et XIII ; D. n° 62-1587 du 29-12-1962 mod., not. art. 12 ; avis du conseil supérieur de la Cour des comptes du 11-05-2007 et du 15-11-2007 ; Conseil d’Etat (section des finances) entendu.

Chapitre Ier

Mise en jeu de la responsabilité du comptable public

Art. 1er. - La responsabilité pécuniaire du comptable public est mise en jeu, au cours d’une procédure amiable, par l’émission, par le ministre chargé du budget, d’un ordre de versement.

Toutefois s’agissant :

1° Des comptables publics d’établissements publics nationaux nommés par le ministre de tutelle avec l’agrément du ministre chargé du budget, l’ordre de versement est émis par le ministre de tutelle ;

2° Des comptables publics des établissements publics locaux d’enseignement relevant du ministre chargé de l’éducation, l’ordre de versement est émis par ce ministre ;

3° Des comptables publics des établissements publics locaux d’enseignement agricole relevant du ministre chargé de l’agriculture, l’ordre de versement est émis par ce ministre ;

4° Des comptables publics des établissements publics locaux d’enseignement relevant du ministre chargé de la mer, l’ordre de versement est émis par ce ministre. 

Art. 2. - L’ordre de versement est notifié immédiatement au comptable public intéressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

La notification peut également être effectuée dans la forme administrative. Il est donné récépissé de cette notification et, à défaut de récépissé, il est dressé procès-verbal de la notification par l’agent qui l’a faite. 

Art. 3. - Le comptable public peut, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’ordre de versement, solliciter un sursis de versement du ministre chargé du budget.

Le ministre chargé du budget se prononce dans un délai d’un mois à compter de la réception de la demande de sursis. Passé ce délai, le sursis est réputé accordé.

La durée du sursis est limitée à une année.

Toutefois, si le comptable public a présenté une demande en remise gracieuse, le ministre chargé du budget peut prolonger la durée du sursis jusqu’à la date de la notification de la décision statuant sur ces demandes. 

Art. 4. - Si le comptable public n’a pas acquitté la somme réclamée et s’il n’a pas sollicité ou n’a pas obtenu le sursis ou si le sursis est venu à expiration, un arrêté de débet est immédiatement pris à son encontre en remplacement de l’ordre de versement par l’autorité qui avait émis celui-ci.

Toutes les dispositions du décret du 29 décembre 1962 susvisé et des textes subséquents relatives aux arrêtés de débet pris à l’encontre des comptables de l’Etat sont étendues aux arrêtés de débet pris contre les comptables des organismes publics autres que l’Etat. 

Chapitre II

Constatation de la force majeure et apurement
des déficits en relevant

Art. 5. - En application du V de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, l’autorité administrative compétente constate l’existence de circonstances constitutives de la force majeure, par arrêté ou décision. 

Art. 6. - L’arrêté ou décision constatant la force majeure mentionnée à l’article 5 est notifié dans les conditions et formes prévues à l’article 2.

Art. 7. - En application du dernier alinéa du V de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, les sommes correspondant à l’apurement du déficit relevant de la force majeure sont supportées par le budget de l’organisme intéressé. Toutefois, elles sont supportées par le budget de l’Etat lorsque le comptable intéressé est un comptable public de l’Etat ou d’un établissement public local d’enseignement. 

Chapitre III

Remises gracieuses

Art. 8. - Le comptable public peut demander au ministre chargé du budget la remise gracieuse des sommes mises à sa charge, intérêts compris.

Art. 9. - I. - Le ministre chargé du budget statue sur la demande en remise gracieuse, après avis du supérieur hiérarchique et, le cas échéant, de l’organisme public et du ministre intéressé.

II. - Dans le cas où la somme allouée en remise est supportée par un organisme public autre que l’Etat, dans les conditions prévues à l’article 11, le ministre, après avis de l’organisme intéressé, ne peut accorder une remise supérieure à celle acceptée par celui-ci.

III. - Tout projet de remise gracieuse dont le montant excède une limite fixée par arrêté du ministre chargé du budget est soumis à l’avis de la Cour des comptes.

Art. 10. - Les sommes allouées en remise gracieuse ne peuvent être mises à la charge du comptable subsidiairement responsable.

Art. 11. - En application du second alinéa du IX de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé, les sommes allouées en remise gracieuse sont supportées par le budget de l’organisme public intéressé. Toutefois, elles sont supportées par le budget de l’Etat :

1° Lorsque le comptable de l’organisme public est un comptable public de l’Etat ou d’un établissement public local d’enseignement, sauf si le débet affecte le service d’un régisseur ou résulte de pièces irrégulièrement établies ou visées par l’ordonnateur ;

2° Lorsque le comptable de l’organisme public est mis en débet à raison d’une dépense irrégulièrement payée du fait d’une absence des contrôles prévus à l’article 12 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, lorsque cette absence de contrôles résulte du plan de contrôle hiérarchisé approuvé par le ministre chargé du budget.

Art. 12. - Dans le cas où des recouvrements sont opérés sur un débet couvert partiellement par un comptable public, les sommes correspondantes servent à rembourser :

1° Par priorité, les organismes publics, dans la limite et au prorata, le cas échéant, des sommes laissées à leur charge ;

2° Pour le surplus, le comptable. 

Art. 13. - Les prélèvements sur les cautionnements en numéraire et en valeurs sont effectués à la diligence du comptable qui a pris en charge l’arrêté de débet.

Dans le cas de caution solidaire fournie par une association de cautionnement mutuel, le ministre chargé du budget notifie à l’association les débets constatés à la charge de ses adhérents et dont le versement incombe à celle-ci.

Art. 14. -Lorsque le ministre décide de ne pas suivre l’avis de la Cour des comptes, sa décision est motivée. La Cour des comptes en est informée. 

Chapitre IV

Déconcentration

Art. 15. - I. - Le ministre chargé du budget peut déléguer par arrêté, et dans les conditions prévues par le présent décret :

1° Aux trésoriers-payeurs généraux le pouvoir de prendre les décisions constatant la force majeure, les ordres de versement et les arrêtés de débet à l’encontre des comptables directs du Trésor ;

2° Aux directeurs des services fiscaux le pouvoir de prendre les décisions constatant la force majeure, les ordres de versement et les arrêtés de débet à l’encontre des comptables de la direction générale des impôts.

II. - Le ministre chargé de l’éducation peut déléguer par arrêté, et dans les conditions prévues par le présent décret, aux recteurs d’académie le pouvoir de prendre les décisions constatant la force majeure après avis du trésorier-payeur général, les ordres de versement et les arrêtés de débet à l’encontre des agents comptables des établissements publics locaux d’enseignement.

III. - Le ministre chargé de l’agriculture peut déléguer par arrêté, et dans les conditions prévues par le présent décret, aux directeurs régionaux de l’agriculture et de la forêt le pouvoir de prendre les décisions constatant la force majeure après avis du trésorier-payeur général, les ordres de versement et les arrêtés de débet à l’encontre des agents comptables des établissements publics locaux d’enseignement agricole. 

Art. 16. - Le ministre chargé du budget peut déléguer par arrêté, et dans les conditions prévues par le présent décret :

1° Aux trésoriers-payeurs généraux le pouvoir de se prononcer sur les demandes de sursis de versement et sur les demandes de remise gracieuse des comptables directs du Trésor, des agents comptables des établissements publics locaux d’enseignement relevant du ministre chargé de l’éducation ou du ministre chargé de l’agriculture ;

2° Aux directeurs des services fiscaux le pouvoir de se prononcer sur les demandes de sursis de versement et sur les demandes de remise gracieuse des comptables de la direction générale des impôts. 

Art. 17. - Dans l’exercice des pouvoirs mentionnés aux articles 15 et 16, les trésoriers-payeurs généraux, les directeurs des se rvices fiscaux et les directeurs régionaux de l’agriculture et de la forêt ne peuvent déléguer leur signature.

Dans l’exercice de ces pouvoirs, les recteurs d’académie peuvent déléguer leur signature au secrétaire général d’académie dans les conditions prévues par voie réglementaire. 

Art. 18. - Ne peut faire l’objet de la délégation de pouvoir prévue aux articles 15 et 16 le pouvoir :

1° De constater et d’apurer les débets consécutifs à des détournements de fonds publics ;

2° D’apurer les débets prononcés par la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes ;

3° De statuer sur les demandes de remise gracieuse dont le montant excède le seuil fixé par l’arrêté mentionné au III de l’article 9.

Chapitre V

Dispositions diverses et transitoires

Art. 19. - Par dérogation aux dispositions du présent décret, les conditions selon lesquelles les sursis de versement et décharges de responsabilité sont accordés aux comptables directs du Trésor, en matière de recouvrement de contributions directes par voie de rôles, sont fixées par le code général des impôts.

Art. 20. - Les dispositions du présent décret sont applicables aux agents chargés de l’intérim des postes comptables.

Les dispositions des articles 8 à 14 sont applicables aux comptables de fait. 

Art. 21. - Le délai mentionné au troisième alinéa du paragraphe III de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisé est fixé à six mois.

Ce délai peut être prorogé par décision du ministre chargé du budget.

Art. 22. - Le deuxième alinéa du II de l’article R. 112-18 du code des juridictions financières est remplacé par les dispositions suivantes :

« Les chambres réunies statuant en formation restreinte jugent les affaires dont elles sont saisies par le premier président sur proposition d’une chambre ou sur réquisitoire du procureur général. Elles statuent sur les affaires renvoyées devant la Cour après cassation.

« Elles formulent l’avis de la Cour des comptes sur les projets de remise gracieuse soumis par le ministre chargé du budget sur les demandes présentées par les comptables publics et assimilés, les comptables de fait et les régisseurs constitués en débet. »

Art. 23. - Les projets de remise gracieuse sur les débets consécutifs à des injonctions de versement ou à des ordres de versement notifiés à compter du 1er janvier 2008 sont soumis par le ministre chargé du budget à l’avis de la Cour des comptes prévu à l’article 9.

Art. 24. - Le présent décret est applicable en Nouvelle-Calédonie, dans les Terres australes et antarctiques françaises et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 de la Constitution. 

Art. 25. - Le décret n° 64-1022 du 29 septembre 1964 relatif à la constatation et à l’apurement des débets des comptables et assimilés est abrogé. 

Art. 26. - La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 5 mars 2008.

François FILLON

Par le Premier ministre :

Le ministre du budget, des comptes publics
et de la fonction publique,

Eric WOERTH

La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer
et des collectivités territoriales,

Michèle ALLIOT-MARIE